Je découvre à l'instant que des voix s'élèvent pour faire interdire l'expo consacrée à Bastien Vivès lors du prochain festival d'Angoulême, sous prétexte qu'il aurait fait l'apologie de l'inceste et de la pédophilie dans un de ses albums. A première vue, ça me parait complètement loufoque. Mais comme je connais très mal son œuvre, j'aimerais être éclairé. Quelqu'un ?
Je ne connais pas cet auteur dessinateur, mais je supose que c'est en partie lié à ses (certaines de ses BD) et déclarations en 2017, sans doutes à l'époque des dites BD :
" "Moi déjà, l'inceste ça m'excite à mort. Pas celui de la vraie vie, mais celui raconté, je trouve ça génial. Tous ces trucs-là font des histoires incroyables. Quand tu transgresses, quand tu fais quelque chose que t'as pas le droit de faire, c'est agréable à lire", déclarait l'auteur en 2017 dans une vidéo sur le site de Madmoizelle (retirée depuis)."
L'article entier ci-dessous :
Vivès est un auteur que j'ai découvert lors de la parution de sa première BD : Elle(s). Une histoire classique dont l'intrigue tourne autour des premiers amours d'adolescent. Ce n'est pas vraiment le scénario qui m'a emballé, mais étrangement son dessin. Effectivement, son dessin reste particulier et je ne sais pas vraiment pourquoi, mais il m'interpelle et j'ai lu bon nombre de ses BDs dont celles qui posent problèmes.
Pour comprendre un peu mieux le contexte, je dois également parler de la maison d'édition les requins marteaux et ils avaient lancé la revue Ferraille (en référence à la revue Métal hurlant). Une sorte de fanzine avec une dose de dérision et d'humour déjanté à ne surtout pas prendre au sérieux. Ils seront comme Hara-Kiri puis Charlie Hebdo. (Il y a un auteur que j'adore, c'est Winshluss et particulièrement lors de sa période Ferraille, vous comprendrez aisément que j'ai acheté toutes les revues Ferraille.)
Dans la continuité de leurs œuvres, deux membres de ces éditions, Felder et Cizo lanceront la fameuse collection BDCul (Le numéro 1 de la BD "indébandante"). Je n'ai pas besoin d'insister pour savoir que vous comprendrez qu'il y a de la dérision, de la provocation. Cette interview le démontre assez
Donc Vivès se donnera à cœur joie de participer à cette collection BDCul avec Les melons de la colère, puis La décharge mentale et pour finir Burne out
Son humour est potache, graveleux et dénué de toute finesse, transgressif, mais comme je ne le prends pas au sérieux et qu'il ne faut surtout pas le prendre au premier degré, il m'a bien fait rire. Glénat lancera la collection porn'pop et Vivès produira Petit Paul (Le petit frère de l'héroïne de Les melons de la colère). Aussi Glénat est un grand éditeur, à l'inverse de Les requins marteaux et cette BD sera plus distribuée.
Je vais reprendre cette maxime que l'on attribue à Pierre Desproges On peut rire de tout mais pas forcément avec tout le monde A mon avis, c'est là que le bât blesse et je dirais que si on est pas préparé, c'est évident que cela débouche sur un scandale. Ce sont des BDs trash, transgressives et polémiques qui dérangent comme l'a fait Hitler = SS de Vuillemin et Gourio. En plus, il semble que dans ses interview, il aie poussé le bouchon encore plus loin, comme Alain nous l'explique.
Je ne suis pas étonné de la réaction de nombreuses personnes.
(Rem. Dans Filles perdues, Alan Moore aborde également la zoophile, la pédophilie, ..., mais avec de la finesse, par comme Vivès et cela passe. J'ai le souvenir que Gotlib a aussi été dans la transgression)
@patrick-d Merci, Patrick. Je comprends mieux maintenant.
Même si je connais très mal Vivès, je me doutais bien qu'il ne faisait pas sérieusement l'apologie de l'inceste et de la pédophilie. Je suis donc fixé.
Cela me fait plaisir d'avoir pu éclairer votre lanterne.
Aujourd'hui, c'est dans des journaux romands que j'ai vu que le festival d'Angoulême a annoncé l'annulation de cette exposition.
TDG.ch Polémique dans la bande dessinée Le Festival d’Angoulême annule l’exposition de Bastien Vivès
Voici un autre article Actua BD - Le FIBD annule la carte blanche à Bastien Vivès
« Des menaces physiques ont été proférées vis-à-vis de Bastien Vivès. Il n’est dès lors pas possible pour l’événement d’envisager que sa programmation puisse faire peser de tels risques sur un auteur. »
et je constate que cela a pris une ampleur inquiétante : «des intimidations apparaissent à l’encontre de membres de l’équipe du Festival».
@patrick-d Merci, Patrick.
Tout cela m'attriste. J'espère qu'un dialogue pourra se nouer entre les différentes parties et qu'on évitera l'escalade.
De mon côté, j'ai du mal à me positionner : je suis pour une répression impitoyable de toute apologie de la pédophilie mais je suis également pour laisser la liberté à un auteur de s'exprimer dans le registre qu'il a choisi. En revanche, je pense aussi que l'auteur doit d'emblée être clair sur ses intentions : toute ambiguïté est dangereuse. Il est possible (je répète que je connais très mal et l'auteur et son œuvre) que Bastien Vivès ait volontairement laissé planer le doute. Par défiance peut-être, voire sans doute. Il a joué un jeu dangereux et est en train d'en payer le prix fort. En espérant encore une fois que cela n'aille pas trop loin.
Le combat contre la pédophilie et celui du droit à liberté de créer méritent mieux que des insultes et des menaces sur les réseaux sociaux.
Après avoir vu l'une ou l'autre capture d'écran de quelques-unes des interventions de Bastien Vivès sur FB (qui datent d'avant la polémique actuelle), je ne pense pas qu'un dialogue soit directement possible ! 🤣
(il m'a l'air quand même bien énervé, l'ami Bastien 😀)
J'ai également parcouru le web en lisant divers articles à son sujet et j'ignorai tout de ses interventions sur les réseaux et des polémiques que cela a engendrées. L'auteure Emma m'est inconnue, mais je dois avouer que les propos de Bastien (certainement certains dont tu fais référence dans ton message) sont dignes d'un "troll". Je suis tombé sur le cul des nues en apprenant ce qui tourne autour de sa BD décharge mentale.
Comme toi, je ne pense pas qu'actuellement un dialogue soit envisageable 😉
Concernant cette exposition qui a été annulée, je me suis demandé si elle présentait effectivement des planches de ces BDs pornographiques ou qu'elle parlait de ces sujets sensibles, clivants et polémiques.
Au fond, est-ce vraiment cette exposition-là qui est la source des problèmes et de la montée en épingle ou est-ce que c'est la personnalité controversée de Vivés qui a déclenché ce raz-de-marée?
Est-ce que cette exposition n'aurait fait aucuns remous si cet auteur n'avait pas provoqué des polémiques?
Je me pose la question
L'expo a été attaquée (pas d'autre mot) car c'est Vivès, c'est contre lui qu'on s'acharne.
L'expo devait en outre ne monter que des originaux faits pour l'occasion et non des extraits problématiques de sa bibliographie.
On peut ne pas aimer, j'ai mis du temps à me faire à son dessin, on peut être dérangés par certains trucs, ce qui est tout à fait compréhensible mais de là à lui prêter des intentions déviantes et illégales et à censurer son travail...
Les terr0ristes ont gagné, bravo internet, bravo les gens supérieurs à nous qui comprennent mieux que nous les dangers d'un dessin.
Monde de merde
Merci, c'est donc ce que je craignais. Si j'ai bien compris, l'affaire "Emma et la charge mentale" (si je peux l'appeler ainsi) ne date pas d'hier et cette expo n'a été qu'un prétexte pour le "clouer au pilori".
oui, apparemment les propos qu'il n'aurait pas dû avoir datent de 2018 ou 2020, je ne sais plus, j'ai lu trop d'articles à vomir, je suis triste pour la liberté de dessiner.
je n'ai pas fb ni twitter et je suis sur insta depuis peu et rien qu'en voyant les communiqués de Vivès et de bdangoulème et les commentaires, j'hallucine...
en plus personne est content : les moralisateurs qui ont fait annuler se plaignent que le festival victimise Vivès
bref, désolé, je me suis retenu toute la journée
merci
Pour moi ce n'est pas la liberté de dessiner qui est en cause et qui est en danger dans ce moment précis, mais plutôt la façon de s'exprimer lors des interviews...
Peut-être s'est-il repris depuis cette réponse qui date de 2017, mais en tous les cas, son propos était plus qu'embiguë, que ce soit "dans la vraie vie" ou "dans le dessin" le terme "m'excite à mort" et la suite reste quand même très problématique... enfin pour moi en tous les cas, et je comprends très bien ceux que cela choque (même si de ce côté-là il y à une forme de récupération.), sans vouloir jouer les "mères la pudeur" loin de là.
On peut rire de tout, pas forcément avec tout le monde, mais hors sketchs ou BD, et d'autant plus en interview, il faut rester de toute façons claires dans son propos.
( Moi aussi je me retiens depuis plusieurs jours ! 😉 )
L'expo a été attaquée (pas d'autre mot) car c'est Vivès, c'est contre lui qu'on s'acharne.
L'expo devait en outre ne monter que des originaux faits pour l'occasion et non des extraits problématiques de sa bibliographie.
On peut ne pas aimer, j'ai mis du temps à me faire à son dessin, on peut être dérangés par certains trucs, ce qui est tout à fait compréhensible mais de là à lui prêter des intentions déviantes et illégales et à censurer son travail...
Le problème de Vivès est qu'il semble prendre un malin plaisir à surfer sur les ambiguïtés dans ses interventions médiatiques (interviews et/ou réseaux sociaux). Jusqu'à agir comme un gros troll. Ca n'aide ni à apaiser le débat ni à lui donner du crédit. Quand on veut être écouté, on se rend écoutable.
Les terr0ristes ont gagné, bravo internet, bravo les gens supérieurs à nous qui comprennent mieux que nous les dangers d'un dessin.
Monde de merde
Les réseaux sociaux ont accouché de groupuscules militants très radicalisés, c'est indéniable, mais je ne parlerais pas de terroristes. Il faut peut-être aussi se demander si ce n'est pas une réponse proportionnelle à la tolérance malsaine qui a prévalu pendant des décennies vis-à-vis des pédophiles, violeurs, prédateurs sexuels en tout genre qui gravitaient (et gravitent parfois encore) dans l'industrie du cinéma, de la musique et de la littérature jusqu'à l'émergence du mouvement MeToo... Parce que, pour les victimes, les terroristes étaient ces gens-là ainsi que tous ceux qui ne voulaient pas voir, minimisaient les faits ou se gaussaient des plaignants.
Après, un auteur BD, puisqu'on parle de Vivès, a aussi une responsabilité dans la façon de rendre lisible son œuvre, surtout sur des sujets aussi délicats que la pédophilie, le viol, etc. Vivès a choisi d'offrir au public des œuvres au contour flou en lui disant "démerde-toi !". Ensuite, à ceux que ces histoires désarçonnaient ou choquaient, il les a invités à aller se faire voir (en tout cas, c'est mon sentiment mais je peux me tromper). Pas étonnant dès lors que ça lui retombe aujourd'hui sur la gueule.
Maintenant, que certains militants manquent d'humour ou de discernement, c'est un débat dans lequel je n'entrerai pas...
(Oui, je suis lâche 😜)
On peut rire de tout, pas forcément avec tout le monde, mais hors sketchs ou BD, et d'autant plus en interview, il faut rester de toute façons claires dans son propos.
C'est marrant parce que je discutais il y a quelques jours avec un copain au sujet du groupe de rock slovène Laibach. Dans les années 80, ses membres jouaient beaucoup avec l'imagerie totalitaire voir carrément nazie. Il me disait que ça le choquait, non pas parce qu'ils jouaient avec ces codes mais parce qu'ils n'étaient jamais très clairs sur leur positionnement politique en interview (“Laibach est aussi nazi qu’Hitler est peintre”).
Quelque part, Vivès joue le même jeu malsain.